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lundi 26 avril 2010

Philippe Petitgenêt - Stimultania, Strasbourg (25/04/2010)


Philippe Petitgenêt est un jeune artiste avec une formation liée au visuel mais c’est au moyen des sons qu’il préfère s’exprimer. Ses concerts ou plus précisément installations sonores se présentent comme des errances dont le fil rouge consiste en des paysages sonores, de l’électroacoustique, de la musique ambiante, improvisée et parfois de la musique bruitiste.
La prestation proposée se nomme Silent Bloc. Il s’agit là (je cite) : "d’un projet de concert spatialisé sur 6 postes radio : Chaque radio est assimilée à une entité, c’est un porte voix, la lucarne sonore par laquelle nous parvient le témoignage d’enregistrements passés, une mémoire publique intemporelle. Les 6 radios toutes bien différentes les unes des autres, chacune ayant son propre tempérament, constituent l’outil de diffusion et de mixage de ces sons."
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Petite angoisse à l’arrivée : une panne d’électricité dans le quartier risque de provoquer l’annulation de la prestation. Cela serait vraiment dommage, encore une fois la Galerie Stimultaniapropose un accueil chaleureux et une mise en place à base de tapis et de coussins pour s’installer à proximité des radios rend impatients et curieux quant au projet "Silent Bloc" qui doit nous être présenté.
Retour de la fée électricité, Philippe Petitgenêt peut alors démarrer son "concert". Pendant près d’une heure, le public profite d’un mélange sonore fait d’extraits musiques, de toutes sortes de bruits sur lesquels se superposent par moment des samples vocaux aux origines diverses et marqués historiquement. L’artiste s’affaire derrière ses tables de mixages et sa platine où les disques sont régulièrement renouvelés. Tout ceci se vit dans une ambiance obscure où les seules petites lueurs proviennent d’éclairages discrets sur 6 postes de radios d’époques différentes.
Prestation au final tranquille, où l’auditeur se laisse rapidement porter et part à la rencontre de différentes époques sonores

mardi 13 avril 2010

Sage Francis - The Best of Times

Me voilà bien partie pour faire un article par single que Sage Francis nous balance comme de véritables petites bombes. Après un premier extrait "Slow Man", le tant attendu morceau avec Yann Tiersenest désormais en écoute et une nouvelle fois c’est du bon, du très bon Sage FrancisThe Best Of Times est un mélange magique entre la poésie musicale de notre Yann Tiersen national et la douce puissance avec laquelle Sage Francis se plonge dans l’interprétation de ce morceau. C’est à la fois beau, poignant et mélancolique : une réussite.
Li(f)e promet d’être l’un des meilleurs albums de l’année.
En écoute :

vendredi 9 avril 2010

Programme - La Dynamo, Pantin (09/04/2010)



Délicat exercice qu’évoquer le retour de Programme sur scène. Les 8 années d’absence live depuis la tournée 2002 et ses concerts tendus créent inévitablement une forte impatience chez les connaisseurs du groupe et une curiosité évidente pour ceux qui découvrent Programme ces dernières semaines. Le groupe s’était exprimé dans cette série d’entretiens juste avant ce redémarrage scénique et avant la sortie de l’album Agent réel prévue le 8 mai prochain chez Ici d’ailleurs.

Le souci sera d’en parler, sans trop en dire, pour ne pas trop en dévoiler et laisser ce plaisir de la (re)découverte aux spectateurs des concerts à venir. La Dynamo de Pantin est une salle fort accueillante. C’est dans ce cadre convivial que le groupe a fait sa dernière résidence et que se sont tournées quelques scènes de la vidéo Agent réel. D’ailleurs dans le hall d’entrée, près du bar, sur un grand écran est diffusée à deux reprises cette fameuse réalisation. Chose rigolote quelques amis qu’on devine y font de la figuration. C’est, me semble-t-il, une première ce genre de vidéos pour Programme. Jamais pour les albums précédents de clips illustrant des morceaux du groupe n’avaient été réalisés. Le travail proposé parFlorent Tarrieux impressionne le public déjà présent. Rapidité, fluidité, énergie se dégagent instantanément de ces premières visions de la vidéo. Une partie met en scène une captation de concert puis suivent des plans extérieurs où l’esthétisme architectural s’impose. Aucune déception quant à l’effet "camera shift" évoqué lors de son entretien par Florent : l’image donne vraiment l’impression de se dédoubler et étonne en apportant un effet accéléré surnaturel. Pas véritablement dérangeant même plutôt impressionnant : cela crée une forme d’urgence.

Et bien justement la deuxième diffusion à peine terminée, voici venue l’urgence de se rendre enfin dans la salle pour assister à la performance du groupe. Cadre un peu "solennel" avec placements assis mais tout de même convivial puisque la scène est très proche, est au sol et le public ne se retrouve assis que sur quelques petites rangées de gradins. Installation simple avec ordinateurs, amplis et guitare, scène plutôt vaste avec quelques néons en éclairage au sol rendant l’ensemble assez épuré : le démarrage du concert est imminent.
Arrivés sur scène, les deux hommes se placent rapidement : Arnaud Michniak à gauche, Damien Bétous sur la droite. Le set prend le temps de débuter avec la plage bruitiste "Nous". Lors des passages plus expérimentaux, on a plaisir à reconnaître des samples de paroles bien connues : "Bogue", "Le jour est le brouillon de la nuit...", "Je sais où je vais" etc. On remarque qu’il y a eu une réflexion intéressante pour que ce retour ne soit pas complètement déconnecté de ce que fut Programme au début des années 2000. En même temps ces rappels qui évoquent tant de choses aux connaisseurs du groupe restent très discrets et s’insèrent de manière fort subtile aux morceaux inédits proposés par le groupe.
Avec des titres comme "Agent réel" le groupe reprend une étiquette beaucoup plus rock : l’énergie est tout autant dans le jeu de guitare de Damien Bétousque dans la façon pugnace avec laquelle Arnaud Michniak déclame ses paroles. Les moments plus "calmes" n’en sont pas moins tendus : sorte de prémices avant la tempête du morceau suivant.
La prestation cherche l’originalité et se différencie nettement des concerts auxquels on assiste habituellement. Quelques tentatives d’interprétation intéressantes retiennent l’attention : des paroles juste articulées, pas un son ne sort de la bouche d’Arnaud Michniak, pas de voix et pourtant l’interprétation est bien là présente dans une élocution silencieuse. Sans temps mort le groupe enchaine les morceaux, la tension n’est pas seulement dans le public : sur scène les deux hommes donnent toute leur énergie et leurs forces dans une démonstration de grande qualité. Une nouvelle version complètement époustouflante du morceau "Une vie" est présentée en fin de première partie. Le groupe nous offrira un rappel en réinterprétant, de façon apparemment quelque peu différente, un des nouveaux morceaux proposés lors du set principal.
Grand retour du groupe sur scène pour un plaisir partagé à la fois par le public mais aussi par Arnaud et Damien. Visiblement très heureux de rejouer ensemble, de nous présenter une performance léchée et qui tient admirablement la route, les deux hommes sont tout sourire entre chaque morceau. Soirée émouvante, soirée historique dans l’aventure Programme que nous étions quelques uns à avoir la chance de partager. Attention le groupe ne donnera sans doute pas énormément de concerts, il ne faut surtout pas hésiter à se rendre aux dates possibles !

mardi 6 avril 2010

Programme (Arnaud Michniak - Damien Bétous)

2010 marque le retour de l’une des formations les plus intrigantes et passionnantes que la scène hexagonale ait connu cette dernière décennie.Programme, le groupe porté par Arnaud Michniak et Damien Bétous, avait secoué le monde musical avec deux albums coups de poing : Mon cerveau dans ma bouche (2000, Lithium) et L’Enfer tiède (2002, Lithium). Leurs textes incisifs, sombres à la limite du nihilisme déclamés sur des musiques électro-rock et expérimentales ont su marquer durablement les esprits. Une unique tournée s’était déroulée en 2002 avec des prestations tendues et audacieuses. En parallèle, le groupe s’était investi dans deux projets ambitieux : Génération finale en 2001 (une installation mêlant musique, objets et lumières présentée lors de la Biennale d’art contemporain de Lyon) et Bogue mini album sorti en 2004 (suite à une commande de France Culture pour l’Atelier de Création Radiophonique). Depuis toutes ces années aucune formation n’a réussi à autant impressionner et innover en tentant de dépasser les limites et en jouant sur l’inédit et l’inattendu tant au niveau des textes que de la musique. C’est donc avec une impatience énorme et un grand plaisir que nous accueillons ce retour du groupe avec la sortie d’Agent réel, leur troisième album (le 3 mai prochain chez Ici D’ailleurs) et une tournée débutant vendredi 9 avril à Pantin (Chronique du concert à lire ici). Un nouveau site vient de voir le jour pour marquer ce retour : www.prgrmm.com/.
Arnaud Michniak et Damien Bétous répondent, chacun de leur côté, à quelques-unes de mes interrogations liées à cette (longue) attente et nous expliquent ce que sera le « nouveau » Programme. Puis Florent Tarrieux, qui a réalisé le clip Agent Réel (visible en fin de chronique de l’album) et qui a filmé le groupe lors de sa résidence à la Dynamo de Pantin, nous raconte quel a été son travail autour de Programme(Encore merci à eux trois d’avoir bien voulu contribuer à cet article d’entretiens et à Florent Tarrieux pour ses photos exclusives)
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ENTRETIEN # 1 : ARNAUD MICHNIAK
Sfar  : Bonjour Arnaud. Comment se sent-on à quelques jours des premières performances d’un retour que beaucoup attendent fébrilement ?

Arnaud  : Serein et stressé, ça bouge, envie et peur du moment, lorsqu’il arrive, l’intensité qui se dégage reprend tout comme un point de départ. Impatient en fait.

Sfar  : Lorsque nous nous étions croisés au cours de la tournée solo, il m’avait semblé comprendre que Programme reviendrait sur le devant de la scène dès 2009. Que s’est-il passé, pourquoi ce délai plus long ?

Arnaud  : Il s’est passé qu’on est des maniaco-dépressifs et qu’on est hyper exigeants, et qu’on invente le chemin en même temps qu’on trouve la destination.
On a aussi rencontré des gens qui ont du talent et qui voulaient nous aider parce que Programme les avait nourris, je pense à Flo qui nous fait des vidéos, Guillaume la pochette, Romain le site, et ça prend du temps à mettre en place.
Et puis il y a la recherche, c’est difficile à expliquer, pourquoi c’est pas encore ça, ou que ça l’est trop, comment on trouve une justesse et la nécessité de se remettre en marche.

Sfar  : Il était intéressant de noter, au cours des concerts que tu as faits pour la tournée Poing Perdu, la mutation de l’artiste Arnaud Michniak en Agent Réel au fur et à mesure des prestations (d’ailleurs des morceaux inédits du futur album de Programme ont parfois été présentés.). Était-ce une envie réfléchie ou naturellement inévitable ?

Arnaud  : Réfléchi et inévitable ne sont pas forcément antinomiques…
En fait c’était une urgence ressentie et qui devait sortir, et c’est pas normal de dire à l’urgence : non attends on va d’abord faire autre chose, puisqu’elle est urgente, je l’ai dite dans des petits bars, des discussions, des scènes improvisées dans des lieux autogérés, à Toulouse, Paris, Bruxelles, drôle de période, assez solitaire bizarrement…
Je remercie Damien de ne pas avoir fermé la porte pour autant.
C’était le moment de l’ombre la plus courte, où Agent réel était personnifié par moi, alors qu’aujourd’hui il est un disque de Programme où la musique de Damien prend autant de place que le texte, pour devenir une entité sans doute plus large, peut-être une ombre comme on en croise dans l’histoire, ou un moment collectif, ou public comme ces phrases dans ton blog, et déjà c’est celui qui le dit qui l’est.

Sfar  : Programme de 2000 était oppressant, torturé, pesant, parfois désabusé… On retrouve un peu cette atmosphère sur le morceau « Nettoyage Ethique ». Je mets à part « Nous » (et sa grosse rigolade) que je vais évoquer plus loin. Dans son ensemble, Agent Réel, me paraît plus vindicatif. On devient plus serein une décennie plus tard ? La révolte, l’envie d’aller de l’avant a pris le dessus sur tout le reste ?

Arnaud  : On devient surtout plus conscient de ce qu’implique le fait de ne pas être serein…
Aller de l’avant et la révolte, ça me parait indissociable oui, mais une grande partie du combat est à mener contre soi-même, ce disque ça a été ça, et une lutte avec les mots, l’expression, entre la voix et les sons.
Et puis c’est une tentative de réponse à cette période qu’on traverse.

Sfar  : Qu’est-ce qui a évolué dans ta manière de travailler avec Damien Bétous ?

Arnaud  : Ce qui nous va on le dit, pareil pour ce qui nous va pas. Une compréhension mutuelle grandissante, née d’un dialogue décomplexé.
C’est difficile de laisser la place à l’autre, on veut quelque chose, et on veut que l’autre veuille la même chose, en fait on capte pas que ça ne puisse être le cas, pas parce qu’on est débile, intolérant, enfin pas que, mais souvent parce qu’on a la vision de quelque chose, et qu’une conscience veut s’exprimer, c’est peut-être ça ce groupe, une vision et une conscience, et quatre bras qui chargent et déchargent un camion.
Pour reprendre, on doit comprendre ce que veut l’autre, sans rien vouloir à sa place, mais avec. Et c’est là que quelque chose se passe en général…

Sfar  : Il y a donc sur l’album une très longue piste, « Nous », qui se rapproche véritablement de ce que l’on peut faire en musique bruitiste. Ce morceau est impressionnant dans sa composition, la façon dont il est structuré et les sentiments qu’inspire son écoute. Qu’est-ce qui te plaît dans ce genre d’expérimentations musicales ?

Arnaud  : Je cherchais la définition d’un nouveau « nous ».
Je me rendais compte que plus on définissait plus on enfermait ce qui voulait éclore dans cette définition, et dans le fait de définir. Amis du pressage de cerveau bonsoir.
La forme que m’a proposée Damien était libre, se faisait sur la longueur comme ça, par métamorphoses en fait, ça collait parfaitement avec l’esprit du texte.
C’était aussi un autre temps, dans d’autres proportions, plus grandes.
Ce qui me plait c’est le sentiment de liberté que ça procure.

Sfar  : Souvent tu as évoqué l’envie que cette prochaine tournée deProgramme soit une réelle mise en danger du groupe sur scène. Dans tes fantasmes les plus fous, comment imagines-tu cela ?

Arnaud  : Il s’agissait encore et toujours de casser le rapport scène/public, on en a parlé souvent avec Damien, on a essayé mais la rupture en fait n’est pas forcément riche et intéressante, c’est une position radicale, mais qui perd en route la richesse et la complexité de l’expression humaine qui l’accompagne, ou la rigidifie, ce qu’elle gagne spectaculairement, elle le perd dans sa véracité.
Et puis ce qu’elle promet masque ce qu’elle tue…
Bref c’est aussi un passage, qui par sa dureté, va permettre d’accéder à autre chose, de plus ouvert.
On est davantage des artisans au final.

Sfar  : Qu’en est-il de tes activités liées à la vidéo et à l’image ?

Arnaud  : J’avais un projet de long métrage auquel j’ai cru un bon moment, ça s’appelait « bientôt », c’était l’histoire de gens qui d’un coup quittent ce qu’ils sont en train de faire, se rassemblent et forment un mouvement de révolte, le texte « ce n’est pas ça » sur le nouvel album en est une trace, j’avais trouvé des prod professionnelles et tout, qui me disaient que brûler la ville ( le film finissait dans cette ambiance) ce serait une mise en scène des effets tout ça et à qui je disais non c’est vraiment brûler la ville en fait c’est un peu un film documentaire si vous voulez, comment dire… jusqu’au moment où j’ai commencé à faire un faux scénar, mais j’y arrive pas en fait, c’était encore une fois un projet bien barré, ensuite c’est devenu l’histoire d’un gars qui fuit on ne sait pas quoi puis qui rencontre un problème et va en faire une obsession, une nouvelle fuite jusqu’à devenir vraiment fou, et puis tout est tombé à l’eau petit à petit en même temps que je m’emmêlais les pinceaux à plein de niveaux !
J’ai fait la musique d’un doc réalisé par un couple d’amis, « Il s’agit de ne pas se rendre » et ça m’a beaucoup plu.
Maintenant je ne sais pas trop, pas de projet visuel à l’horizon, plutôt envie d’écrire, reprendre toutes mes notes pour ces films et voir ce que ça peut donner.
Peut-être avec Programme, si Damien le sent.

Sfar  : Ta dernière grande claque musicale : un disque, un concert que tu aimerais faire partager ?

Arnaud  : Un film qui ressemble à un concert : « Un prophète ».

Sfar  : Merci beaucoup pour tes réponses. Nous sommes nombreux à nous réjouir du retour de Programme, à très bientôt sur scène.
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ENTRETIEN # 2 : DAMIEN BÉTOUS
Sfar  : Bonjour Damien, tu as une formation musicale classique et pointue. Ce que tu fais au sein de Programme a toujours été très ambitieux, pas forcément facile d’accès. Pourtant, pour côtoyer depuis des années grand nombre de passionnés du groupe, ce qui m’a souvent frappée c’est la disparité des auditeurs. Beaucoup de personnes avec des profils très divers se retrouvent dans ce que propose Programme. Il y a une grande impatience quant au nouvel albumAgent Réel et au retour du groupe sur scène. Qu’est-ce qui attire tant ce public à ton avis ?

Damien  : Je pense que les raisons d’aimer un groupe aussi difficile d’accès est que ces publics cherchent probablement du vrai, du réel, du risqué. Programme a toujours essayé par la voie la moins facile, au risque d’être décalé ou carrément parfois à côté. Nos titres sont donc sur une brèche, fragiles mais têtus.

Sfar  : Quand l’aventure Programme a été mise en stand-by, qu’as-tu fait de ton côté ? Peux-tu nous parler de ce qui s’est passé pour toi durant toutes ces années ?

Damien  : Beaucoup de choses mais rien de musical. J’ai un métier à côté qu’il fallait que je prenne plus sérieusement en main.

Sfar  : Étais-tu resté en relation avec Arnaud Michniak ? Cela a-t-il toujours été une évidence que Programme reviendrait ?

Damien  : Pas du tout. Je n’ai pas suivi son projet solo. Il n’était pas forcément question de se reformer. J’avais envie de quelque chose de simple, de rapide. Mais la machine a repris du service toute seule et nous revenons avec cet album, qui aurait pu avoir une toute autre allure.

Sfar  : En quoi le travail solo d’Arnaud Michniak avec son album Poing Perduet la tournée qui a suivi ont influencé l’album Agent Réel et les concerts à venir ?

Damien  : Ce serait plutôt à lui de répondre ! Je crois comprendre au fil des années qu’il évolue sur des continuités, qui progressent et se mélangent avec le temps. Il y a donc un rapport direct, mais je ne peux pas dire forcément lequel.

Sfar  : Comment penses-tu avoir évolué entre 2000 et aujourd’hui dans ce que tu apportes au groupe ? Par exemple pour créer un morceau aussi fascinant que « Nous » (plage fort longue de musique bruitiste et d’interférences vocales) qu’est-ce qui te sert d’inspiration ? Quels sont tes objectifs de création ?

Damien  : En fait, « Nous » revient à mes origines musicales. Ce n’est pas une évolution forcément. J’avais envie de prendre du temps pour dire des choses. Avec cette forme longue, on est dans un morceau « normal » de Programme, mais avec une dimension qui reste inerte. Le temps joue sur la compréhension. Les textes en ressortent plus forts, il me semble.

Sfar  : Qu’attends-tu des prochaines performances du groupe sur scène ?

Damien  : Je n’attends rien des performances. Il y a des morceaux qui ne peuvent pas se jouer autrement. Leurs version disque n’est qu’une « photo » de ce qu’ils auraient pu devenir. On essaye aussi de jouer devant des gens, donc de prendre une certaine sensibilité en compte. Il en résulte une dérive vers la performance, qui est un monde bien loin de « l’improvisation » dans le sens classique, mais qui répond mieux aux émotions de nos morceaux lors des concerts.

Sfar  : Le réalisateur Florent Tarrieux a notamment filmé le groupe lors de votre résidence à la Dynamo de Pantin. Que va-t-il apporter au niveau du visuel scénique ?

Damien  : Pour le moment il nous réalise un clip qui annonce notre travail. Il a fait un travail énorme de recherche sur nos identités et directions artistiques. Il travaille aussi avec d’autres personnes qui ont suivit également le projet (Guillaume, Romain...) pour notre artwork et site internet. En ce qui concerne la scène, nous démarrons avec quelque chose d’intimiste qui tranche radicalement avec notre scénographie de 2002. Nous évoluerons peut-être vers autre chose, si cela est nécessaire. Nous avons fait des essais de projection, nous attendons.

Sfar  : Ta dernière grande claque musicale : un disque, un concert que tu aimerais faire partager ?

Damien  : « Six Marimbas » de S.Reich (1986)

Sfar  : Merci énormément Damien d’avoir pris la peine de répondre à ces quelques questions. A très bientôt sur scène.

Damien  : Merci et à vendredi !
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ENTRETIEN # 3 : FLORENT TARRIEUX
Sfar  : Comment t’es-tu retrouvé à travailler avec Programme ?

Florent  : J’ai découvert Diabologum à l’époque de #3 par le biais de Guillaume Barry, avec qui je collabore très souvent (notamment sur Agent réel). La première rencontre avec Programme a eu lieu en 2005, car je souhaitais utiliser un extrait de l’album Bogue dans un de mes courts métrages, "pyllyq" (voir le teaser).
J’ai ensuite participé à l’étalonnage et à la post-production sur les projets de films d’Arnaud ( Appelle ça comme tu veux et Prise de son dans un hôpital ) puis nous avons décidé de poursuivre la collaboration sur ce nouvel album.

Sfar  : Tu as filmé le groupe lors de leur résidence à la Dynamo de Pantin dans le but de réaliser un clip pour l’album Agent Réel . Il y aura aussi quelques images annexes qui serviront à alimenter le site du groupe tout juste créé par Romain Malauzat (www.prgrmm.com). As-tu reçu des directives particulières de la part d’Arnaud et de Damien ?

Florent  : Oui, la résidence à la Dynamo en janvier dernier était exclusivement dédiée au tournage du clip. La réflexion autour du site et du clip s’est faite conjointement, ce qui nous a rapidement permis de trouver une cohérence.
Je n’ai pas vraiment eu de directives, nous avons parlé de ce que nous voulions et ne voulions pas, et sommes tombés assez vite d’accord.

Sfar  : Le clip Agent réel sera présenté en exclusivité lors du concert de Pantin. Peux-tu nous en parler sans forcément tout nous dévoiler ? Quelles étaient tes envies concernant cette réalisation ?

Florent  : L’idée était de partir des pistes séparées de l’album, et de bâtir avec cette matière sonore et textuelle un mix spécifique qui allait nous servir pour la mise en images. Nous voulions sortir de la méthode habituelle, et procéder par aller-retours, afin de questionner le rapport image / son. Je pense que cela nous a permis d’obtenir un objet hybride et autonome.
Les textes de Programme étant déjà très riches en terme d’univers visuel, nous ne souhaitions pas nous contenter d’illustrer les propos, afin d’éviter les redondances sémantiques. Les images constituent donc une dimension supplémentaire, cohabitant avec les textes, parfois en contradiction, parfois en juxtaposition, l’idée étant de développer un éclatement, un décalage, plutôt qu’une convergence.
L’une des expérimentations visuelles les plus présentes est la technique du « Caméra shift », qui consiste à filmer une scène avec deux caméras, dans un angle restreint, puis d’alterner très rapidement les deux prises de vue au montage, ce qui accentue la profondeur et produit un effet assez épileptique, presque gênant, comme si l’image était multiple, et que l’on se trouvait dans un pli de réalité.
Le film est scindé en deux parties.
Dans un premier temps, on assiste à une captation presque brute d’un concert de Programme, dans laquelle nous avons surtout travaillé sur l’aspect scénographique. Puis, un système d’éléments graphiques, comme une pensée qui se construit, nous mène à l’extérieur, dans les paysages post-urbains du 93, afin d’incarner cette pensée dans le réel.
C’est intéressant de diffuser le film à la Dynamo. Non seulement le lieu et son architecture a son importance dans le projet mais il est également évident que sans leur soutien, le film n’aurait pas vu le jour sous cette forme.

Sfar  : Quelles sont tes autres activités liées à l’image et à la vidéo ?

Florent  : Je m’intéresse à la vidéo sous plusieurs aspects ; je réalise des courts métrages, des scénographies pour des spectacles (Xavier Kim, Pascale Henry), des installations, des clips. Je travaille également sur un projet de série documentaire sur la génétique avec Cyprien Nozières.

Sfar  : merci énormément.

dimanche 4 avril 2010

Scary Mansion + Le Loup - La Laiterie (04/03/2010)


Belle programmation ce jeudi soir dans la salle Club de La Laiterie. Deux des artistes les plus emblématiques de l’audacieux label bordelais Talitres nous faisaient le plaisir d’être présents : Scary Mansion pour débuter la soirée suivis par leurs compatriotes indie folkeux Le Loup.
Le cadre intimiste de la petite salle strasbourgeoise sied parfaitement à la prestation de Scary Mansion. Le groupe semble très à l’aise, sans doute ravi de partager une nouvelle fois l’affiche avec leurs collègues de label.Leah Hayes se pose devant nous avec ses deux acolytes. Toute fluette dans sa combinaison noire, son thunderstick en mains, la jeune femme se lance dans une interprétation très convaincante d’une grande partie des morceaux du dernier album du groupe : Make Me Cry. La batterie sait se montrer puissante dans les moments plus énergiques, la tension retombe dans les phases plus nostalgiques. Avec son brin de voix fragile Leah Hayes nous enchante et nous permet de débuter en toute beauté une soirée de grande qualité.

On attendait impatiemment Le Loup. Moi, le public mais aussi le batteur de Scary Mansion qui les rejoindra même sur scène pour faire de la rythmique sur un titre, quand il ne sera pas sur le côté à dodeliner de la tête. Deux albums, superbes, dont le dernier Family qui porte une bonne dose de frisson folk psychédélique. Empressement donc de découvrir les américains dans un cadre aussi intime mais quelques craintes malgré tout. Les morceaux sont plaisants, l’écoute agréable, de belles harmonies vocales mais sur scène ceci ne se révèlera-t-il pas un peu lassant et peu entrainant ? Les membres prennent place, un guitariste barbu, bonnet, chemise à carreaux, Sam Simkoff tee-shirt jaune Maryland avec un gros cerf dessiné dessus et des bâtons d’encens plantés dans une orange à la main. Tout est là pour créer une ambiance de communion indie folk entre morceaux planants, chants envoûtants. On s’attend à une grande douceur et du quasi recueillement. La surprise est de taille, le premier morceau débute à peine que le chanteur à lunettes se secoue dans tous les sens et joue d’un appareil qui crée des effets d’échos et de réverbération sur sa voix rendant son chant limpide. Il y a dans l’interprétation de Le Loup une énergie folle, des sons expérimentaux proches de ceux proposés pas un groupe comme Animal Collective et pourtant la prestation reste tout le temps digeste. La rythmique est efficace, entêtante, sauvage même. Les titres s’enchaînent avec un même dynamisme communicatif. Le morceau "Le Loup (Fear Not)" , véritable perle du premier album, est présenté dans une version majestueuse : d’abord une intro instrumentale quasi psychédélique suivie d’une montée en tension voix-instruments qui embrase carrément la salle. Pour une soirée tranquille on repassera : Le Loup décoiffe, emporte tout sur son passage. Sortes de mutants schizophrènes de l’indie folk ces américains surprennent par leur capacité à produire sur disque des morceaux déjà magiques mais plutôt calmes qu’ils transcendent complètement en un moment de folie furieuse musicale lors de leur passage sur scène.

samedi 3 avril 2010

Sage Francis - Slow Man

Single téléchargeable légalement ICI
en avant goût de l’album Li(f)e dont la sortie est prévue le 11 mai 2010
Ceci ne sera pas une information pour ceux qui attendent fébrilement la sortie du nouvel album de Môssieur Sage Francis. Il y a, en effet, quelques jours Pichforka proposé le morceau "Slow Man" en écoute. La découverte de ce titre se révèle fort prometteuse pour ce futur album Li(f)e qui se trouve être une réalisation collective avec certains des plus grands noms de la scène indépendante internationale. Pour "Slow Man" ce sont les membre du groupe Calexico de Tucson qui s’y collent. Entre autres artistes et collaborations exceptionnelles on trouvera un duo avec notre Yann Tiersen hexagonal. Petite pointe d’émotion, Li(f)e, sera également l’occasion de retrouver le regretté Mark Linkous pour l’une de ses dernières réalisations. Petite piqûre de rappel de ce qui nous attend afin de rendre l’attente encore plus insupportable.



- 01 . Little Houdini (written by Sage Francis and Jason Lytle)
- 02 . Three Sheets to the Wind (written by Sage Francis and Chris Walla)
- 03 . I Was Zero (written by Sage Francis, Richard Terfry, Brian Deck, Tim Rutili, Jim Becker, and Gordon Patriarca)
- 04 . Slow Man (written by Sage Francis, Joey Burns, and John Convertino)
- 05 . Diamonds and Pearls (written by Sage Francis, Thomas Hagerman, Shawn Gilbert, Jeanie Schroder, and Nicholas Iurata)
- 06 . Polterzeitgeist (written by Sage Francis, Tim Rutili, Jim Becker, and Brian Deck)
- 07 . The Baby Stays (written by Sage Francis and Tim Rutili)
- 08 . 16 Years (written by Sage Francis, Kurt Read, Brian Deck, Tim Rutili, Jim Becker, and Gordon Patriarca)
- 09 . Worry Not (written by Sage Francis and Tim Fite)
- 10 . London Bridge (written by Sage Francis & Chris Walla)
- 11 . Love The Lie (written by Sage Francis & Mark Linkous)
- 12 . The Best of Times (written by Sage Francis & Yann Tiersen)